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ESTIMATION: 7000 / 9000 €
Grand Christ rédempteur en tilleul sculpté, dos ébauché, restes de polychromie. Debout, la tête inclinée, un important drap entour de sa taille, retenu sur le devant par un nœud très construit et formant des plis arrondis sur les jambes, le genou gauche est dégagé ; un pan remonte à l’arrière sur l’épaule gauche et passe derrière la tête du Christ.
Atelier de Jacques Sarazin (Noyon 1592 – Paris, 1660), milieu du XVIIe siècle
H. : 137 cm
(manques visibles, accidents, vermoulures et restaurations)
Cette grande sculpture monumentale est directement inspirée du Christ rédempteur dit également Christ portant sa Croix, réalisé par Michel Ange en 1521 et conservé dans l’église de la Minerve à Rome. Ce modèle qui a connu un très grand succès fut une source d’inspiration dans les siècles suivants pour des sculpteurs comme Edmé Bouchardon au XVIIIe siècle lorsqu’il réalise le Christ à la colonne de l’église Saint-Sulpice à Paris. Notre sculpture va emprunter à Michel Ange la forme triangulaire du visage du Christ. La forme de la barbe bifide, les mèches enroulées et ondulée, les moustaches très tombantes sont autant d’emprunts qui indiquent que le sculpteur de ce Christ a vu et étudié l’œuvre du grand maître toscan.
L’analyse des drapés, qui sont ici particulièrement architecturé et mis en scène de manière presque théâtrale nous indique que nous sommes devant une sculpture de l’époque baroque.
Il est possible de rapprocher ce Christ d’une cariatide de la coupole de l’église San-Andréa-della-Valle à Rome. Les cariatides qui soutiennent la coupole de l’abside de cette église ont été réalisé par le sculpteur français Jacques Sarazin. En effet on retrouve exactement la même position élancée. (fig a), la même plasticité du corps et ces mouvements de bras qui
donnent à la sculpture un mouvement ascendant.
Il est possible également de rapprocher cette grande sculpture d’un buste de Christ en terre cuite du même sculpteur (fig b).
Ce buste fait parti d’un ensemble avec le buste des douze apôtres. Ils étaient, conservés dans son atelier et ont été vendus aux collections royales en 1666. La figure du Christ, sans être identique possède des caractères communs avec notre grande sculpture : les mèches qui s’enroulent de la même manière formées par des lignes d’épaisseurs différentes, mais aussi le calme méditatif de la figure du regard, avec les sourcils légèrement froncés, la bouche fermée, presque close, le regard lointain.
Ce rapprochement va en induire un second, concernant les drapés. Jacques Sarazin participe à la réalisation des cariatides du pavillon de l’horloge pour le Louvre en fournissant les dessins et modèles en 1639. On remarque dans les drapés de ces
sculptures la même concentration d’étoffe, retenue par une main, et s’enfonçant dans la matière. Des plis se forment, très près du corps, de manière circulaire et étagée, donnant une fluidité au tissus. Cette technique se retrouve dans notre sculpture du Christ rédempteur.
La parenté avec l’œuvre de Jacques Sarazin est sans équivoque, mais l’œuvre peut avoir été réalisé, sur un projet du maître par un atelier pour répondre à une commande ou simplement un projet resté sans la réalisation en pierre. Jacques Sarazin rentre de Rome en 1629. Notre sculpture est sans doute réalisé à son retour en France.
Il n’en reste pas moins que les caractères personnels de l’artiste s’expriment fortement dans les traits du visage, et dans les drapés si bien architecturés.
Ouvrage consulté : Barbara BREJON DE LAVERGNÉE, Geneviève BRESC-BAUTIER,
Françoise de LA MOUREYRE, Jacques Sarazin, Sculpteur du Roi, 1592-1660), Exposition, cat. exp.
Noyon, musée du Noyonnais, 5 juin 1992 – 14 août 1992] ; Paris, 1992
Expert : Benoit BERTRAND